Annuaire

Inscription au barreau

Règlement intérieur

Commission immobilier du 22 septembre 2025 - Compte-rendu de la réunion consacrée aux baux d'habitation

Procès-verbal de la réunion de la Commission Droit Immobilier du 28 septembre 2024

Participants :

·         Membres de la Commission Droit Immobilier du Barreau des Hauts-de-Seine

·         Maître Antoine Christin, co-animateur

·         Maître Stéphanie Lamora, co-animatrice

·         Madame Bénédicte Rivet, Magistrate, coordonnatrice des Juges des contentieux de la protection (JCP) des Hauts-de-Seine

Ordre du jour :

1.    Propos introductifs

2.    Bail de parking

3.    Contentieux des requêtes

4.    Prescription

5.    Commandement de payer et surendettement

6.    Nouveaux délais du commandement de payer

7.    Questions diverses


COMPTE-RENDU POINT PAR POINT

1. Propos introductifs

Les échanges ont débuté par une présentation de la situation des juridictions du département, qualifiée de difficile. Une magistrate intervenante a exposé les difficultés structurelles majeures, notamment un sous-effectif chronique des greffes qui conduit à une souffrance au travail et oblige les magistrats à accomplir des tâches de greffe. Elle a insisté sur son approche pragmatique du droit et sur l'importance fondamentale de la maîtrise de la procédure, qualifiée de clé de voûte de tout contentieux. Parallèlement, il a été rappelé le rôle essentiel de l'avocat dans la construction de la jurisprudence, le juge se fondant sur les arguments et la stratégie présentés. L'accent a été mis sur la nécessité d'une rigueur absolue dans la constitution des dossiers, notamment sur la vérification de la qualité à agir du demandeur, afin de présenter un dossier complet et clair qui influence positivement la perception du juge.

La mise en perspective de ces propos liminaires révèle des enjeux cruciaux. Sur le plan stratégique, la transparence sur les dysfonctionnements des juridictions fournit aux avocats des éléments pour expliquer les délais de traitement à leurs clients. La confirmation de l'importance cardinale de la procédure renforce la nécessité d'une rigueur formelle absolue, toute approximation étant susceptible d'être sanctionnée. Sur le plan déontologique et professionnel, la qualité du travail présenté forge la réputation de l'avocat. Il est rappelé que l'avocat n'est pas un simple transmetteur d'informations mais doit conserver une maîtrise intellectuelle sur les dossiers qu'il défend, garantissant ainsi la pertinence des actes qu'il signe.

2. Bail de parking

Les débats ont porté sur la compétence juridictionnelle pour les baux de parking conclus isolément, c'est-à-dire non accessoires à un bail d'habitation. La position consolidée des Juges des Contentieux de la Protection (JCP) est que ces baux relèvent de la compétence du Tribunal Judiciaire (TJ) statuant en procédure écrite. Il a été noté une divergence d'interprétation avec certains magistrats qui renvoient les dossiers au JCP. Il a été fermement rappelé que depuis la réforme de 2020, la chambre de proximité étant une chambre du TJ, ce dernier ne peut se déclarer incompétent mais doit procéder à une simple mesure de réorientation interne du dossier.

Concernant les baux de parking accessoires à un bail d'habitation, où la compétence du JCP est acquise, une difficulté récurrente a été soulignée : le manque de rigueur dans les actes de procédure (assignations, commandements de payer) qui omettent de justifier le caractère accessoire, visent des délais contradictoires ou présentent un décompte de dette non ventilé.


3. Contentieux des requêtes

Les échanges ont couvert plusieurs aspects des procédures sur requête et des procédures accélérées.

Pour obtenir des délais d'audiencement plus courts, il a été clarifié que la procédure accélérée au fond (PAF) n'est pas applicable devant le JCP et que la voie adéquate demeure l'assignation en référé pour les cas d'urgence caractérisée.

Une pratique alternative et informelle a été évoquée : adresser un courriel circonstancié au greffe pour solliciter un audiencement prioritaire.

Concernant la procédure d'injonction de payer (IP), il a été confirmé qu'elle n'est pas soumise à l'obligation de tentative de résolution amiable préalable (art. 750-1 CPC) mais qu'elle comporte des pièges de compétence territoriale.

Pour les requêtes spécifiques, il a été rappelé que la désignation des domaines après le décès d'un locataire relève du TJ et non du JCP, et que le succès d'une requête en reprise pour abandon de domicile dépend entièrement de la qualité et de la précision du constat du commissaire de justice.

Enfin, il a été insisté sur la nécessité de motiver solidement les demandes, comme la déchéance de la trêve hivernale pour mauvaise foi, qui ne peut se déduire du seul impayé.

Enfin, un enjeu déontologique est rappelé : l'avocat engage sa responsabilité sur la complétude et la pertinence du dossier qu'il présente, même s'il est pré-constitué par un tiers, et doit en conserver la maîtrise intellectuelle.

4. Prescription

Les débats ont porté sur la complexité de l'application des règles de prescription pour les charges locatives.

Il a été rappelé que le juge ne peut soulever d'office ce moyen.

La discussion s'est focalisée sur le point de départ du délai de prescription pour l'action du locataire en répétition de l'indû. Une position de première instance a été exposée, selon laquelle ce délai ne commence à courir qu'à compter de la régularisation annuelle des charges par le bailleur. En l'absence d'une telle régularisation, le locataire n'ayant pas connaissance de sa créance, le point de départ de la prescription est suspendu.

5. Commandement de payer et surendettement

L'articulation entre la procédure d'expulsion et la procédure de surendettement a été examinée. Le point de vigilance majeur concerne l'effet d'une décision de recevabilité du dossier de surendettement sur un commandement de payer en cours. Si la décision de recevabilité intervient pendant le délai imparti au locataire pour payer (six semaines ou deux mois), le commandement de payer perd son efficacité. Le locataire se trouvant dans l'impossibilité légale de régler les causes du commandement, le bailleur ne peut plus s'en prévaloir pour obtenir la résiliation du bail. Par ailleurs, il a été souligné que lorsqu'un bailleur s'oppose à l'octroi de délais de paiement, il doit impérativement justifier de sa propre situation financière, une justification quasi systématiquement absente des dossiers.

La stratégie de l'avocat du bailleur ne doit pas se limiter à réclamer l'expulsion, mais doit inclure une démonstration de l'impact financier des impayés sur son client, afin de donner au juge les moyens de prendre en compte la précarité potentielle du bailleur et de motiver un éventuel refus de délais de paiement.


6. Nouveaux délais du commandement de payer

Les débats se sont concentrés sur l'application de la loi du 27 juillet 2023, qui a réduit de deux mois à six semaines le délai du commandement de payer.

Il a été précisé que ce nouveau délai ne s'applique qu'aux baux conclus ou renouvelés après l'entrée en vigueur de la loi. Pour tous les contrats antérieurs, l'ancien délai de deux mois reste applicable. Cette situation a généré une grande confusion et une hétérogénéité des pratiques. Face à un acte erroné ou un doute, la pratique judiciaire consiste à retenir le délai le plus long (deux mois) au bénéfice du locataire, en considérant qu'une erreur sur le délai constitue une nullité de forme qui doit causer un grief et ne peut être soulevée d'office.

L'absence de doctrine unifiée expose les bailleurs à des allongements de procédure. Pour les avocats et commissaires de justice, l'enjeu est technique et de responsabilité : la rédaction d'actes non conformes peut engager leur responsabilité et complexifie le travail du juge.

 

7. Questions diverses

Plusieurs points non inscrits à l’ordre du jour ont été abordés.


Allongement extrême des délais de jugement

Il a été fait état de l'allongement extrême des délais d'audiencement, atteignant janvier 2027 dans certaines juridictions. Cette situation a été expliquée par une pénurie critique de personnel de greffe et la nécessité de déléguer des magistrats. Face à l'impossibilité matérielle de tenir les audiences, la décision a été prise de réduire drastiquement leur nombre. La possibilité d'engager des procédures en responsabilité contre l'État pour déni de justice a été mentionnée.
Stratégiquement, les avocats doivent intégrer ces délais dans leur conseil au client, gérer les attentes et explorer les alternatives (médiation, transaction).


Hiérarchisation des demandes et actualisation de la dette

La nécessité de hiérarchiser les demandes dans les assignations en résiliation de bail a été soulignée. Présenter à égalité un défaut de paiement et un défaut d'assurance crée une confusion pour le juge. Il est préférable de viser en demande principale le défaut d'assurance, dont la clause résolutoire est acquise de plein droit et sans possibilité de délais.

Par ailleurs, la question de l'actualisation de la dette à l'audience a été clarifiée : dans le cadre d'une acquisition de clause résolutoire, elle constitue une simple "liquidation partielle" de l'indemnité d'occupation et peut être accordée même en l'absence du défendeur. Pour une action en prononcé de la résiliation, il a été conseillé de demander la rétroactivité de la résiliation pour couvrir les loyers impayés en cours d'instance.


L'office du juge et l'application de la loi

Il a été ouvertement évoqué que les juges peuvent parfois rendre des décisions contra legem de manière assumée, par souci d'équité, par exemple en octroyant des délais de paiement dans des cas où la loi ne le prévoit pas.

Ces échanges soulignent un enjeu fondamental lié à la part de pragmatisme et d'équité dans la décision judiciaire. Pour les avocats, la connaissance de ces pratiques non écrites est essentielle pour anticiper la décision du juge et adapter leur stratégie. Cela montre que le droit est un domaine vivant où la pratique juridictionnelle joue un rôle créateur et où la clarté, même sur des points évidents, est une garantie contre des difficultés d'exécution.

Pratiques de l'audience et constitution des dossiers

Une série de conseils pratiques a été partagée : privilégier des plaidoiries très concises ("dépôt commenté") mettant en exergue l'élément décisif, et fournir un dossier complet, lisible et facilement exploitable.

Un point de procédure crucial a été rappelé : le respect du délai de placement de l'assignation (quinze jours avant l'audience) sous peine de caducité relevée d'office.

Face aux incertitudes du RPVA, il a été vivement recommandé de conserver les méthodes traditionnelles (lettre recommandée, commissaire de justice) et de se présenter à l'audience muni de la preuve de ce placement.

Organisation des audiences et dématérialisation

La suggestion de mettre en place des rôles horaires pour réduire le temps d'attente a été discutée. Si la pratique existe pour les audiences au fond, des réserves ont été émises pour les référés. Le déploiement de l'applicatif Portalis a été présenté comme la solution à terme. De fortes réserves ont été exprimées sur la dématérialisation des audiences, qualifiée de "fausse bonne idée" avec les outils actuels, car elle déplace le travail sans le réduire et peut nuire à l'efficacité du traitement des dossiers.


Clôture de la séance et thèmes futurs

La séance s'est achevée par des remerciements pour le caractère pragmatique des échanges. Des suggestions pour les prochaines commissions ont été faites, notamment sur l'expertise conventionnelle.